Myss Tère
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25/11/06 10:08
Après un chargement des vélos sur la place Jemaa el Fna à Marrackech, et les présentations avec notre pilote Adi, nous voilà partis pour le raid enduro sensé cloturer en beauté les festivités de nos noces...40 km de bonne route à travers la plaine du Haouz, et un arrêt ravito dans un village, les choses sérieuses vont pouvoir commencer....
Et c'est tout d'abord par la Garde Royale que ça commence...à cause des grosses intempéries du WE (eh oui, aller à Marrackech pour se trouver sous la flotte, ça ne s'invente pas....) la route est coupée, le guide Hassen et Adi le chauffeur sont obligés de parlementer quelque peu avec le préposé à la circulation...quelques minutes plus tard, nous obtenons l'autorisation de passer, mais à nos risques et périls, rien de tel pour nous mettre une petite pression supplémentaire !
Dès que nous commençons à serpenter sur cette route (longue de 25km environs vers la station de ski de l'Oukaïmeden), nous changeons radicalement d'atmosphère. Tout nous semble plus feutré, presque suspendu dans le temps, et nous n'avons encore rien vu....
Jour 1 – 30km - 3h - 1520m de dénivelé négatif
Départ de la maison forestière d'Agaiouar, sur un sentier muletier tortueux, boueux et parsemé de pierres glissantes jusqu'à Takoucht, premier village traversé, maisons plates en pisé, accrochées aux collines. Nous croisons 2 adolescentes sur des mules, qui sourient en voyant nos difficultés à nous arrêter pour les laisser passer, sur ces cailloux glissants comme des savonnettes....Nous traversons le village tant bien que mal (ben oui paradoxalement, c'est dans les villages que les sentiers sont les moins praticables) quelques enfants nous voient et commencent à courir à coté des vélos, ce qui n'est pas du tout déconcentrant...surtout que certains, jugeant certainement nos performances en descente médiocres (forcément l'équipe des free-rideurs de VTT Mag est passée par là elle aussi, et leur niveau est légèrement supérieur au nôtre....si peu), essayent de nous "aider" en nous tenant le guidon ! C'est notre première rencontre avec des villageois berbères, et nous ne savons pas trop comment réagir, comment ils nous perçoivent, que faire pour ne pas trop paraître incongru...beaucoup trop de questions existentielles pour descendre correctement, ce qui fait que nous avons l'air (enfin surtout moi) de grosses bouses, me gamellant au passage, sous les rires des enfants...je me dis même que certains hommes qui nous regardent passer doivent penser que si l'émancipation de la femme doit mener à un tel désastre, ben vaut peut-être mieux pas trop leur lâcher la bride !
A la sortie du village, le terrain se lisse et devient gris sablonneux, avec des centaines de bosses, plus ou moins grandes...chacun fait sa trace, passe où il veut, les possibilités sont infinies et les difficultés inexistantes, c'est hyper ludique et un peu réconfortant après la mis en bouche villageoise !
En l'espace de quelques centaines de mètres, les couleurs du sol changent pour devenir ocre façon lac du Salagou, et nous suivons maintenant un sentier muletier bien tracé, montant et descendant vers d'autres villages, plus bas dans la vallée, et heureusement plus praticables !
Pendant la pause pipi-photo-paysage, Brice a la bonne idée de démonter son serrage de roue pour vérifier je ne sais quoi....nous passerons bien bon 15' à chercher (en vain bien sûr) ce maudit ressort (en titane s'il vous plaît) dans les cailloux ! Je pense qu'à ce moment là, entre mes cascades dans les villages, et les péripéties mécaniques du Brice, Hassen a du se dire qu'il tenait son gros lot de la semaine !!
Un peu plus loin, au détour d'un champ, nous passerons à coté et sous une haie en figuier de Barbarie, pour ceux qui ont lu le reportage de VTT Mag du mois de mai, ben c'est la même, et pour ceux qui ne connaissent pas, ben disons que ce "figuier" est assez persuasif de ne pas tomber à cet endroit là !
La fin de la descente est très roulante et nous ramène tranquillement vers le 4X4 qui nous attend à l'endroit de la pause déjeuner....tajine de viande au légumes dans un troquet du coin, où Adi nous dit que lui ne mange pas avec des couverts, mais avec ses doigts, en s'aidant du pain, "à la berbère"...un peu handicapés au début, nous nous sommes vite repris (surtout Brice, évidemment !)et bien régalés tout au long de la semaine, puisque si nous n'avons pas touchés de couverts, nous avons du engloutir environ 10kg de galettes (ben oui c'est pas évident quand même de couper la viande avec le pain, il en faut bôôôôcoup !).
Après le traditionnel thé à la menthe (ça si on n'en a pas bu 10l dans la semaine aussi...!), nous repartons en 4X4 pour une descente d'une étape du Marrackech Trophy 2004, un espèce de toboggan géant couleur ocre, au milieu des pins. Presque arrivés en bas, Hassen crève... il commence à réparer, tandis qu'une dizaine de gosses accourent, sortis de nulle part. Un peu timides au début, amusés par nos tenues certainement grotesques à leurs yeux, ils finiront par aider Hassen, en re-re-re-vérifiant l'intérieur de son pneu, après l'avoir vu faire... Un peu plus loin, nous tomberons sur un match de foot disputé sur un stade "posé" au milieu de nulle part, et dont les limites sont matérialisées par de gros cailloux, très astucieusement, une des images que nous garderons longtemps en mémoire...mais pas en photo malheureusement !
Jour 2 – 45km – 5h30 – 2300m de dénivelé négatif
Deuxième montée (bon je le re-précise plus mais on est toujours en 4X4, c'est quand même un voyage de noces....) vers la station de ski d'Oukaimeden, et départ par un piste plate mais très caillouteuse en direction du Col du Taureau où nous repasserons 3 fois durant la semaine. Brice et Hassen décident de couper droit pour rejoindre le sentier qui passe un peu plus bas. C'est un magnifique mur en rocaille, buissons nains épineux et mousses diverses, où tu n'as pas trop droit à l'erreur. En clair, une fois que tu as choisis de t'y jeter, ben c'est pas la peine de penser changer d'avis, ni de trajectoire même, sous peine de finir dans une glissade peut-être artistique, mais certainement très "pelante" !
Là un sentier muletier très très (trop) technique nous mène vers Gouamen, un village reculé, perdu, où l'on ne peut accéder que par sentier justement, pas par une piste à 4X4 pour les touristes...et nous sommes de nouveau l'attraction, et les "rues" sont encore défoncées, avec des grosses marches, et du public enthousiaste....pas de pression non ! Juste une petite glissade pour moi, où je me pèle le genou et je m'explose la main en voulant me rattraper de façon digne, mais à part ça tout va bien et je pense que les villageois souriront encore quelques temps en pensant à moi !
Nous continuons la descente et cela devient plus facile, un bout de piste et nous revenons à la maison forestière d'Agaiouar où nous étions déjà passé la veille, pour une 2° variante en descente. Au passage d'un col un peu plus loin, nous croisons des enfants bergers, sortis de nulle part encore, qui entament facilement la discussion avec Hassen...nous terminons la matinée par un sentier à flanc de montagne, où nous pouvons lâcher un peu les freins (enfin surtout les garçons, moi je profite du paysage...humhum), puisqu'il ne présente pas de passages trop techniques. Quelques passages en dévers, une petite succession de virages en épingles plus bas (c'est que je vais devenir bonne en négociation de virages moi si ça continue comme ça....), nous atterrissons dans un village en bordure d'un oued quelque peu déchaîné par les fameuses intempéries...qu'il nous faut évidemment traverser, sans pont (ben oui sinon cela ne serait même pas drôle) et accompagnés d'une nuée d'enfants qui sortent juste de l'école...certains sont un peu plus entreprenants, parce que le village en question, situé de part et d'autre de l'oued, est en bordure de la très touristique route qui mène à l'Oukaïmeden (sur laquelle nous sommes passés déjà 2 fois vous suivez ?). Or sur cette route, de nombreux touristes passent, en 4X4 principalement, et visitent ces villages "zoo" , en distribuant (certainement pour se déculpabiliser...) des stylos, ou autres bêtises aux gamins. Donc pour eux nous sommes malheureusement associés à des distributeurs de stylos ou de dirhams....
Imaginez donc la scène, 3 péquins en cales auto (c'est un détail qui a son importance, surtout sur des cailloux mouillés...) avec leurs VTT tentant de traverser la rivière, serrés de près par des gosses réclamant, mais sautant avec une facilité plus que déconcertante de rochers en rochers, bien que chaussés de tongs pour la plupart...ni une ni deux, l'un d'entre nous (dont je tairai le nom), surestimant la longueur de ses sauts (un peu comme Rantanplan, zut trop court...!) tombe dans l'eau, sous les fous rires des enfants...bon ben maintenant que t'es mouillé tu peux nous aider à passer les vélos, pis nous aussi par la même occasion, alors que le comité de soutien (les enfants qui sont déjà tous de l'autre coté, eux...) se charge de récupérer les vélos en attendant (espérant?) une éventuelle chute de celle qui n'a pas voulu leur donner de dirhams ni de stylos...
Je pense que là non plus on ne nous oubliera pas de sitôt....
Réconfort dès que nous sortons de l'oued, puisque nous arrivons pile poil à l'endroit du repas (qu'il est fort notre guide !), préparé avec les légumes du jardin se trouvant juste derrière et dans lequel nous dégusterons ce fameux tajine, à l'ombre des pruniers...encore un moment inoubliable....
L'aprés-midi rebelote de la maison forestière pour une 3° variante... on se croirait à Corbère puissance 1000 tellement il y a de possibilités ! Cette fois nous prenons une piste en crête, qui devient très vite un sentier de plus en plus technique, aussi bien en montées (courtes, mais très raides, avec ornières) qu'en descente, avec moultes ornières là aussi, mais passages caillouteux en bonus ! Nous passerons une montée "impossible", défi de la journée, sur lequel Brice jouera son apéro du soir avec Hassen, bilan 0 pied (ou presque) pour les gars, et beaucoup plus pour moi, avec une main en prime ! De là jusqu'à l'arrivée au 4X4 nous croiserons des dizaines de mules chargées de victuailles et ravitaillement pour la semaine, remontées du souk (marché) hebdomadaire qui avait lieu dans la vallée. Nous faisons bien attention à ne pas gêner le passage de ces courageux paysans, même si certains insistent pour nous laisser passer, tenant à tout prix à nous voir descendre sur nos drôles de machines...Hassen nous confiera que la plupart sont "admiratifs" de ce que nous arrivons à faire (plus ou moins bien) en descente...c'est vraiment le monde à l'envers...
Jour 3 – 35km – 4h45 – 1400m de dénivelé négatif
Nous remontons une nouvelle fois au Col du Taureau mais pour basculer de l'autre côté cette fois afin de rejoindre la vallée rose. Hassen nous précise que nous allons faire une bonne partie de piste ce matin, ce qu'il a bien fait de faire parce sinon je pense que je n'aurais pas fait la différence avec un single ! Nous nous embarquons sur une mer de cailloux plus ou moins gros, mais tous très instables évidemment, et plutôt tranchants quand on n'y prend pas garde (ma jambe gauche s'en souvient encore 15 jours après...). Le secret pour passer : de la vitesse pour garder un peu de stabilité, et je pense que c'est la chose principale que j'aurais apprise dans la semaine concernant le pilotage (avec le fait aussi que les protects c'est pas mal quand même....). Nous voilà donc dévalant la "piste", tantôt serrant les fesses pour que ça passe, et pas trop près du ravin si possible, tantôt récupérant sur les parties plus cool, c'est à dire quand il y a des passages de ruisseaux asséchés, donc plus lents et trialisants...fô pas croire, enfin moi j'avais du mal, mais la descente, ça fatigue aussi !
Nous pensant seuls sur la "piste" et dans le coin, Hassen propose une petite pause pipi-photo- paysage bien méritée après toutes ces secousses...erreur, on n'est jamais seuls dans l'Atlas ! Nous ne sommes pas arrêtés depuis 30 secondes que 5 têtes sortent du bois et commencent à engager la conversation après les salutations habituelles. Ils sont très enthousiastes de nous voir, cela anime un peu leur journée, passée pour l'essentiel à ramasser des pignes de pins (je précise que c'est leur travail...ils ne font pas cela pour leur plaisir non plus !). Ils sont de Gouamen, le village perdu traversé la veille et qui se situe de l'autre coté du col que nous venons de passer. Hassen prête spontanément son vélo au moins timide des 5, ou au plus téméraire disons...en effet, ces jeunes n'avaient apparemment jamais fait de vélo avant de nous croiser. Il part donc dans la descente après une explication sommaire du système de freinage (pour info un scott ransom avec disques de 200 en l'occurrence...). Après quelques dérapages plus ou moins contrôlés, l'apprenti vététiste revient vers nous avec difficultés (forcément, on ne lui a pas expliqué comment changer les vitesses, il y a 5 minutes, il ne savait pas faire du vélo!!), et regarde mon vélo, plus petit, donc plus attirant certainement. Je le lui prête volontiers, avec ma selle baissée (je sais que je suis une cagone, mais je m'en fous j'assume...!), tandis qu'un plus grand prend celui de Bryce et un troisième celui d'Hassen. Et les voilà partis tous les trois dans la descente suivis par un autre en courant, dans de grands éclats de rire et cris de frayeur ou d'encouragement....la première "Garoutade Berbère" est née !! C'est impressionnant de les voir faire, leur équilibre et leur dextérité pour des gamins qui n'avaient jamais fait de vélo avant...nous descendons à leur suite à pied, repérant de temps à autres dans les virages de grandes traces de freinage assez appuyés certainement ! Celui qui a le vélo de Bryce revient rapidement vers nous, le vélo étant trop grand, il a (quand même!) du mal à garder l'équilibre dessus. Bryce part alors chercher les 2 autres pour les ramener parce que ça fait quand même presque un kilomètre que l'on est à pied et on les voit descendre toujours plus bas sur la piste au loin toujours morts de rire... Nous les entendrons bientôt remonter, précédés de Bryce qu'ils essayent désespérément de suivre, sans changer les vitesses bien sûr ! Ils arrivent vers nous transpirant et soufflant tout ce qu'ils peuvent, mais ravis et nous gratifiant de pouces levés pour nous remercier de notre geste et nous encourageant quand nous repartons....ce fut un moment de partage assez exceptionnel et émouvant que nous n'oublierons pas, ni eux non plus je pense !
Nous continuons plus pépère notre descente, sur une vraie piste pour finir, avant d'arriver à notre point déjeuner et retrouver Adi. Nous avons rendez-vous à un col d'apparence perdu, mais avec une téléboutique (sorte de magasin point phone, le seul à avoir le téléphone fixe à des kilomètres à la ronde et cela a son importance pour la suite vous verrez...) et une petite épicerie....Le village est quelques centaines de mètres plus bas dans la vallée, et pour nous faire patienter en attendant le repas préparé par un habitant du village, on nous offre le fameux apéritif berbère, autrement dit un thé à la menthe...et nous ne sommes pas au bout de nos surprises...soudain bien plus bas, une silhouette s'avance, venant du village, avec un plateau sur la tête, et un tajine entre les mains, notre repas ! Quelques instants plus tard elle dépose sur notre table devant nos yeux écarquillés la corbeille à pain qu'elle avait sur la tête et ouvre délicatement le tajine, nous révélant une magnifique omelette berbère, sa spécialité....hummmmmmmm! Nous voilà donc installés sous les pins, entre 2 vallées magnifiques, sirotant notre thé, dégustant une super omelette, tranquille, heureux et insouciants...le bonheur quoi ! Comment est-ce possible ? Mais avec "Hassen Cehef", tout est possible voyons ! (pour ceux qui n'auraient pas l'étendue de ma culture, c'est une réplique d'un vieux sketch des Nuls... oui je sais je suis vieille). En fait, grâce à la téléboutique du col, il est arrivé à laisser un message pour son ami du village la veille de notre passage, lui demandant de nous préparer le repas en lui précisant notre heure d'arrivée, voilà tout con, mais quand même exceptionnel je trouve !
Après avoir rechargé nos accus, nous repartons pour la seconde partie de la descente, tout au long de la vallée dite rose, à cause évidemment des ocres magnifiques qui la colorent...Tout d'abord un sentier assez large, blanc, qui fait le tour de la vallée, avant d'arriver à un premier village. C'est le jour de la lessive, et la plupart des femmes sont à la tâche, en train de laver tout en se racontant (certainement vu que je comprend qued au berbère...) les derniers potins du coin. Tous les vêtements sont ensuite mis à sécher un peu partout dans la guarrigue, là sur un buisson, là dans un arbre et dans le village, sur les murets, aux fenêtres, et cela donne un patchwork magnifique de couleurs où que notre regard ce porte dans ce coin...encore un photo loupée pour l'appareil, mais gravée dans ma mémoire.
Le sentier se rétrécit peu à peu et nous croisons une mule attendant son chargement de bois, pas très contente de devoir partager son espace. Super-Hassen s'improvise dresseur, non sans appréhension quand même et nous ouvre le passage...un peu plus loin, obligés de changer de plans à cause d'un éboulement ayant emporté le single sur lequel nous devions passer, nous rebroussons chemin, pour demander au paysan propriétaire de la fameuse mule boudeuse notre direction...maintenant chargée, c'est elle qui nous ouvre le chemin jusqu'à un autre passage, nouvel itinéraire, mais qui je pense sera pérennisé vu le pied que l'on a pris dedans...Il s'agit d'un sentier qui serpente en crête de collines, à travers des sous-bois de chênes avec des shistes au sol rappelant un peu nos terres catalanes. Evidemment, nous sommes un peu plus à l'aise sur ce terrain, et on s'éclate à "surfer" sur ces cailloux et chercher sa trace...on se laisse aller, et on lâche (un peu plus) les freins !
Nous atterrissons dans un village ou nous rejoignons le final d'une des spéciales du Marrakech Trophy. Nous traversons d'abord un oued asséché pour entamer ensuite une montée dans une ornière, pas besoin de chercher la trace...c'est dur, il fait chaud, ça monte très raide par endroits, mais on a beaucoup d'adhérence grâce à la pluie de ces derniers jours et, le pari pour l'apéro du soir aidant, on en vient à bout en se tirant la bourre au final avec un magnifique paysage pour récompense...c'est une régalade !!
Nous enchaînons de suite la descente dans une grande ornière avec de larges virages relevés, des petites remontées sur l'élan, des virages plus serrés...les gars s'en donnent à coeur joie, et moi qui les suit de loin, repérant leurs trajectoires à leurs traces de freins, j'avoue que j'ai parfois du mal à comprendre leur technique...mais c'est ça qui est bien, chacun peut laisser libre cours à sa "créativité", il y de multiples solutions, c'est pas forcément "ça passe là ou bien ça casse" !
Nous finissons la journée par une traversée d'oued (on va finir par en prendre l'habitude), un peu moins mouvementée que l'avant-veille mais qui bastonne quand même...heureusement Adi qui nous attendait un peu plus loin vient à notre "secours" pour nous décharger des vélos, et finalement personne ne se retrouve à barboter les quatre fers (ou cales auto !) en l'air...
Nous remontons dans le 4X4 pour un transfert au chalet du CAF (Club Alpin Français, cherchez l'erreur !) de l'Oukaimeden, à 2800m d'altitude, à environ une heure et demi de route...il est tenu par un français très sympathique, et nous y retrouvons Pierre-Alain, le patron de l'agence qui nous a concocté ce raid enduro, en charge d'un autre groupe pour la semaine. Nous pouvons ainsi lui confier nos premières impressions très enthousiastes et le féliciter de son choix de nous avoir fait faire les montées en 4X4, ce dont nous n'étions pas trop chaud au début (grand couillons que nous sommes...!).
Jour 4 – 25km – 2h30 – 900m de dénivelé négatif
Après une nuit en refuge, et tous les aléas que cela comporte...(surtout quand votre mari adoré vous a choisi un sac de couchage avec température de confort 5° pour "dormir" dans un dortoir surchauffé, enfin bref...), nous repartons pour la troisième fois au Col du Taureau mais la descente se fait version Free-Ride en tentant quand cela est possible de couper les virages de la fausse "piste" caillouteuse de la veille... cela n'était pas prévu à la base, mais nous avons du éviter le tournage d'un film américain à gros budget: Nicole Kidman et Tom Hanks étaient là...cela n'est pas bien grave car la descente qui était initialement prévue était de la piste...mais de la vraie cette fois ! Nous rajoutons un petite boucle autour du "village-lavoir" de la veille, très technique en descente et en montée (et oui c'est une boucle donc forcément...).
Aujourd'hui nous sommes en autonomie, pas de tajine, mais un super pique nique pris à proximité de la maison forestière d'Irguine, avec vue sur une partie du massif de l'Atlas, enneigé et brumeux...
Nous repartons ensuite sur une descente hyper-caillouteuse au début, avec en plus des virages en épingles, donc très difficile...mais j'ai piqué ses protects à Hassen, du coup je suis plus en confiance et je me surprends à passer à certains endroits que je pensais inaccessibles pour moi...surtout quand tu t'arrêtes pour regarder ce que tu viens de passer ! Après 2km de caillasse pure (et dure) (et coupantes!), le sentier devient plus praticable, même s'il reste assez technique et "engagé" comme le dirait Hassen, ou parfois carrément ludique, avec des passages façon toboggan empierré (dixit Bryce), des morceaux avec les empreintes des mules dans la boue du début de semaine, qui secouent pas mal...ornières, virages relevés, dévers, franchissement de rochers, slalom entre les pins....tout y est !! pour moi c'est la meilleure descente de la semaine, grâce à cette diversité de terrains rencontrés, et même si c'est la plus difficile !
Toujours des trajectoires un peu plus appuyées pour les gars, et un peu loufoques parfois, qui ont décidé de lâcher un peu plus les freins...ils font mine de m'attendre tous les 500m pour voir si je vais bien, mais à leur essoufflement (parce que le temps que j'arrive, ils n'ont quand même pas eu le temps de récupérer, je suis un peu plus lente qu'eux mais quand même...!), je me doute que l'inquiétude n'est pas leur unique raison d'arrêt !
Fin de la journée, gouter-thé à la menthe et sandwich à la vache qui rigole (retour en enfance...) à Asni puis transfert dans une auberge à Ouirgane, le Colorado Berbère....le free-ride c'est pour demain...mais la route qui nous y mène, tortueuse, étroite et évidemment très fréquentée, surtout par de gros camions, nous permet d'avoir un aperçu de la conduite free-ride de certains autochtones. En clair, si t'es gros, tu passes, les autres se mettront de toutes façons sur le bas coté...ou dans le fossé...
Arrivés à bon port (ouf!), nous improvisons une aire de lavage au milieu du parking des quads de l'auberge pour refaire une beauté bien nécessaire à nos machines....savonnage, nettoyage, lustrage, graissage....c'est qu'ils en avaient bien besoin !!
Jour 5 – 20km – 3h00 – 1500m de dénivelé négatif
Normalement, cette étape devait être préparée par le patron de l'auberge, trialiste de longue date...mais en discutant avec lui, nous nous sommes aperçus qu'il comptait nous faire faire soit son circuit de quad, ou bien une longue montée en 4X4 pour une descente par piste...Hum hum....Nous décidons donc de changer "légèrement" les plans, et à ma demande, retour à la maison forestière d'Irguine pour se refaire la dernière descente de la veille pour voir si les endroits où je suis bien passée c'était de la chance ou pas !
Le début est toujours aussi difficilement négociable, mais la suite beaucoup plus agréable, puisque nous avons de petits repères qui nous permettent de moins nous faire piéger...et de descendre un peu plus vite ! Moi qui avait du mal à le croire, et ben c'est vrai que (parfois) plus vite, ça passe mieux !
Sur la fin de la descente, nous croisons toute une tripotée de gamins qui revenaient de l'école. Hassen et Brice leur font des passages dans un endroit très délicat, surmotivés qu'ils sont par leurs regards admiratifs et leurs encouragements...ambiance garantie, et il faudra toute la persuasion d'Hassen pour les renvoyer chez eux ensuite !
Nous finissons dans le village de la veille pour un super tajine au mouton...une partie du mouton en question pendant dans notre dos pendant le repas, sur l'étal en plein air du boucher...comme "traçabilité" on fait difficilement mieux !
L'après-midi, nous retournons vers Ouirgane, sur le site du tournage de la vidéo ROAM...du rouge et des bosses de toutes tailles à profusion, certainement taillées pour des exploits free-ridesques.
Nous évoluons donc dans ce magnifique terrain de jeu, montant, descendant, remontant, redescendant, dans des toboggans, dans des ornières, sur une crête, ludique entre les chênes, technique dans l'oued désséché, dans des salines naturelles (on passe alors du rouge intense au blanc éclatant, c'est superbe !), sur des rochers, dans le sable....impressionnant !
Les gars tentent même une descente sur une arrête sans réelle possibilité de se "louper", 10' de pression et d'intense réflexion au sommet, et ça rend rien du tout sur la photo...hihihi ! Au bout d'un long moment "d'errance" dans ce petit paradis, nous décidons de faire le tour de la vallée pour rentrer à l'auberge, et nous tombons par hasard sur le circuit de quad du patron. Pas très technique, mais agréable quand même, enfin en montée un peu moins...Nous le quittons pour une nouvelle traversée d'oued, mais avec ô miracle un pont....enfin une passerelle...assez instable d'ailleurs !
Après un village, nous nous arrêtons sur un chemin étroit pour laisser passer un troupeau de moutons et chèvres, son berger, et deux femmes, toutes étonnées de me voir accoutrée de la sorte...elles s'arrêtent et touchent mes genouillères, me demandant même si je vais bien...!
Fin de la ballade et retour à l'auberge, après une pause goûter...un coca de 35,5 cl (!) dans une bouteille en verre, pour moins de 30cts d'euro en terrasse...je sens que Brice va finir par ne pas vouloir repartir !
Jour 6 – 45km – 3h40 – 1900m de dénivelé négatif
C'est la dernière journée... il faut donc en profiter au maximum. Pas de problème, on va aujourd'hui en prendre encore plein les yeux pour un final en apothéose !
Le 4X4 nous laisse à moitié montée (c'est un petit retour à la vie réelle...) nous faisons la "course" avec des mules, chargées de victuailles et de leur propriétaire...nous montons montons montons....pendant 3km (j'avais bien dit "petit" retour à la vie réelle !). Au col, c'est l'extase, devant nous s'étend le majestueux plateau du Kik, d'une blancheur immaculée...cela ressemble un peu au désert, du moins à la représentation que je m'en faisais, mais sans les dunes ! Nous enchaînons la descente en bordure d'un oued pour ensuite remonter et traverser un premier village, qui semble abandonné...au détour d'une "rue", nous tombons sur un ânon qui refuse tout d'abord de nous laisser passer, puis ensuite de nous laisser partir ! Il va nous suivre pendant un petit moment dans la montée, avant de disparaître...Nous continuons à monter tranquillement vers une deuxième "col", en bordure de champs. Les paysans sont en train de les labourer, à l'aide de leur fameuse mule, et il est difficile de croire, comme nous le dit Hassen, qu'au printemps ce vaste espace qui semble si minéral se couvre de la verdure des céréales qu'ils cultivent...cela doit quand même être quelque chose ! Début de la descente dans un sentier un peu caillouteux bordé de basses murettes, et crevaison d'Hassen, ce qui nous permet de nous ravitailler un peu....ben oui nous n'avions pas mangé une barre depuis le début de la semaine, mais là de monter, ça fatigue !
Notre progression nous amène alors vers un village où nous sommes accueillis par une dizaine d'enfants, et Hassen engage la conversation avec eux, toujours aussi facilement....au final, nous sortons à travers une haie d'honneur, chaque gosse voulant nous taper dans la main au passage, un peu style arrivée d'un triathlon, avec en plus des courageux qui se lancent à notre poursuite sur quelques centaines de mètres...dont certains en "chanclettes" bien sûr !
Après le troisième "col" de la journée, nous entamons la descente finale, la der des ders....au début, single à flanc d'une colline, dans les schistes et les épineux, avec quelques passages techniques, histoire de risquer de s'en mettre une à quelques kilomètres du retour... ensuite nous avons un passage dans des plantations d'oliviers, en bordure d'oued, un régal pour les yeux....s'en suivent quelques toboggans dans la terre....pour finir par une descente sur une strate géologique abrupte toute blanche, et certainement en calcaire, que nous traversons en biais. Heureusement que les pierres sont bien sèches, sinon glissade incontrôlée assurée !
Nous finissons dans Tahanaoute, par un mémorable repas dans une gargote près de la mosquée...Hassen et Adi sont partis acheter un poulet chez le boucher du coin, pour que le patron nous le prépare et le cuise pendant que nous prenons les entrées...quelqu'un a déjà essayé de faire cela en France ?!
Mais notre semaine de rêve s'achève déjà, et la partie la moins agréable nous attend, emballer les vélos avec leurs mousses de protection (mousse de plomberie de diamètres différents suivant les tubes...), puis les faire rentrer dans leur carton du retour avec tous les bagages...heureusement, l'aspect purement commercial et touristique de Marrackech nous ayant écoeuré, nous avons échappé à l'achat compulsif de babouches (la nike berbère...dixit les marchands du souk), et tout rentrera plus ou moins dans le même ordre qu'au départ !
Dernière vision de Marrackech, à l'aéroport, une hôtesse qui voulait nous faire payer une taxe de 20€ par vélo pour excédent de bagages, alors que nous avions droit à 40kg chacun (et que nous n'en sommes qu'à 30 environ...). Grâce en partie à mon calme légendaire, mais surtout au fait que nous refusons de payer (sans avoir vu un responsable et le texte stipulant cette taxe imaginaire) et bloquons donc le comptoir d'enregistrement pendant un bon quart d'heure, nous y échapperons miraculeusement....mais il aura fallu marchander un bon moment !
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Myss Tère & Bryce
papa
LOS MASOS (66)
48 messages
27/11/06 16:44
ton récit donne vraiment l'envie de découvrir cette magnifique région du monde.
en tout cas bravo à vous deux pour avoir garder "l'esprit vert" même dans un moment aussi important (d'autres rêveraient plutôt à des cocotiers, un parasol et farniente toute la journée ). Et encore une fois "FELICITATION"
jack
Latour de France (66)
1562 messages
27/11/06 18:51
Bravo (pour le trait de plume) et merci de nous avoir fait partager votre aventure. C'est vrai que ça met l'eau à la bouche!
jack
Latour de France (66)
1562 messages
29/11/06 17:54
J'ai l'impression de connaître votre guide. Je pense que j'étais assis avec lui dans la navette de l'enduro de l'Aigoual. Et comme la remontée a duré une heure, on a eu le temps de discuter. Avec ses pistes marocaines il a fait rêvé tous les riders du mini-bus.
jack
Latour de France (66)
1562 messages
29/11/06 22:43
Quelqu'un de très sympa, amoureux du Vtt ... et de son pays!
Je vois qu'il s'est procuré un beau vélo depuis l'Aigoual! Il n'a plus sa selle en peau de bête!